Une soudaine envie d'être futile sur des sujets aussi sérieux que Two-Lane Blacktop, Monte Hellman, Will Oldham et quelques connexions. Tout un programme.
Dans le passé j'ai eu deux crises de collectionnite aiguë. Mais aujourd'hui je vais mieux. J'ai même arrêté d'acheter des disques pour faire comme tout le monde. Quant aux DVDs, j'ai lâché l'affaire depuis un moment.
Palace Brothers, Bonnie Prince Billy, Will Oldham et les autres
J'ai découvert Will Oldham en entendant Come In chez Lenoir. A l'époque, le ""groupe"" de Will s'appelait Palace Brothers. J'ai ensuite acheté d'autres disques, vu quelques concert (j'ai même été le voir à Dublin pour un très beau concert avec David Pajo).
J'ai fini par acheter tout ce que je trouvais : 45 tours, compiles de Louisville, participations à d'autres groupes, vidéos etc. Le coffret Havanarama édité à 50 exemplaires, je lai. Bref, jusqu'à Wilding In The West, j'ai tout ce qui peut se trouver sur la discographie du personnage aujourd'hui appelé Bonnie Prince Billy. Mon exemplaire de Get on Jolly m'a été dédicacé par Will Oldham, ainsi que par Mick Turner. Mais pourquoi est-ce que je raconte tout ça ?
Dans ce paquet de disques, on trouve bien sûr la compilation You Can Never Go Fast Enough, hommage au film de Monte Hellman, Two-Lane Blacktop. Disque auquel participaient également Sonic Youth, Calexico ou encore Giant Sand, et d'autres. Two-Lane Blacktop a fait l'objet de ma deuxième collection, beaucoup moins dense toutefois. J'ai découvert le film il y a plus de 15 ans sur le câble. Je crois que j'avais vu The Shooting peu de temps avant à la cinémathèque de la fac dans une copie rouge, rouge, rouge.
Two-Lane Blacktop de Monte Hellman
Quelques années plus tard, ma VHS bien usée, je me suis procuré le DVD qu'Anchor Bay avait édité dans une boite métallique. Puis Monte Hellman a passé plusieurs jours dans le coin puisqu'un un hommage lui était rendu à Montreuil où j'ai pu revoir les films et rencontrer le réalisateur. Mais il était question de collection...
Avant de rencontrer le réalisateur de Two-Lane Blacktop, j'avais commencé à me procurer des photos du film ainsi que quelques magazines et objets rares de l'époque (comme le 45 tours pressé par Universal pour la promo radio du film). Dans un de ces magazines, SHOW, the magazine of films and the arts (mars 1971), la journaliste Shelley Benoit fait un compte rendu sur 8 pages, agrémentées de nombreuses photos, du tournage qu'elle a suivi pendant quelques jours. L'article est intitulé ""On the road with the New Hollywood"". Je ne connaissais pas ce magazine lorsque j'ai discuté avec Monte Hellman, si je l'avais eu ma possession à ce moment, je lui aurait certainement demandé pourquoi il avait supprimé une séquence mentionnée dans l'article.
Sur plusieurs photos, on peut voir Laurie Bird s'amusant dans une rivière, en petite culotte. Sur une autre photo, on la voie plongeant dans l'eau. Au premier plan, on voit les deux mecs de dos, assis torses nus et regardant la fille. La légende de cette photo présente la scène comme étant l'une des rares séquences calmes et sereines du film. J'ai d'abord cru qu'il s'agissait en fait d'un moment de détente sur le tournage et que la séquence n'était pas prévue dans le film.
Puis un jour, j'ai parcouru le scénario du film que le magazine Esquire avait publié, avec encore la jolie Laurie Bird (habillées) en couverture. J'y ait découvert la séquence en question, et il me semble bien (je n'en suis pas certain) que c'est la seule séquence écrite qui n'existe pas dans le montage final. Tout le reste semble y être, y compris une séquence improvisée (celle où la fille fait la manche, mais elle est beaucoup mieux dans le film que dans le scénario) et jusqu'à la pellicule qui crame à la fin. La séquence de la baignade a donc été supprimée et à la lecture du scénario, on constate qu'elle n'était pas si sereine et paisible que ça.
A moins que la séquence ne soit pas réussie ou la pellicule endommagée (des séquences ont été retournées suite à la détérioration d'une partie du matériel filmé), je suppose que ça faisait un peu too much, la conversation des deux types obsédés de bagnoles alors que la fille les invitait à la rejoindre dans l'eau. Et la scène suivante (Laurie Bird et James Taylor faisant l'amour dans le sac de couchage du driver) venait sans doute trop tôt et était peut-être trop explicite. Mais j'aimerai bien avoir la version de Monte Hellman car ceux qui ont vu ses autres films ont peut-être constaté un penchant pour des séquences à l'eau de rose et même de nudité dans ses films ultérieurs comme China 9, Liberty 37 et Iguana. Penchant que ne laissait pas présager la sécheresse des deux fameux westerns.
Mais quel est le rapport avec Will Oldham ?
Le scénariste de Two-Lane Blacktop, du moins celui qui a signé la version finale, est Rudolph Wurlitzer. Monte Helman, dans les conférences, interviews ou dans les bonus DVD, raconte toujours de la même façon pourquoi il a voulu travailler avec cet homme qui était alors écrivain (et qui l'est toujours) et qui allait par la suite signer le scénario de Pat Garrett et Billy le Kid. Pour autant, je n'ai jamais eu la curiosité de lire un livre de cet auteur qui a écrit un livre qui se déroule dans le milieu du cinéma : Lent fondu au noir, publié par Christian Bourgois dans une traduction de Brice Matthieussent.
Le titre original de ce livre est Slow Fade. On en arrive à présent à la raison qui m'a poussé à écrire tout ceci. Drag City va rééditer ce livre aux Etats Unis l'été prochain. Drag City va également éditer un coffret de 5 CDs de la lecture de ce livre par Will Oldham qu'il est possible de pré-commander sur le site pour $20. J'avoue que je vais peut-être me laisser tenter. Une rechute ?
Un peu de commerce